Petit retour en arrière : nous sommes le 1er juin 2018, en Italie.
Un nouveau gouvernement se constitue autour d’une alliance, tant rêvée en France, des populistes de droite et des populistes de gauche.
Movimento 5 Stelle (M5S) et Lega de Matteo Salvini, qui viennent de balayer les partis de gouvernement au pouvoir depuis 40 ans (en particulier la gauche), s’unissent et nomment Giuseppe Conte Président du Conseil, dans un rôle d’arbitre entre les deux partis. Matteo Salvini se retrouve alors nommé Ministre de l’Intérieur. En quelques mois, ce dernier va prendre toute une série de mesures pour tenter d’initier une remise à l’endroit de l’Italie. Lutte contre l’immigration, fermeture des camps de migrants, loi sur la légitime défense, expulsions… on pouvait légitimement le croire : la défense de l’identité et les idées de droite étaient de retour au pouvoir, en Europe de l’Ouest.
En septembre 2019, fort d’une popularité extraordinaire (la Lega est alors à 39% d’intentions de vote !!) qui traduisait une réelle attente des Italiens, Salvini, usé par les objections permanentes à sa volonté de réforme venant d’un M5S à l’agonie, provoque une crise de gouvernement et réclame des élections.
Sa popularité en prend immédiatement un coup, en quelques semaines la Lega perd près de 8 points dans les sondages. Catastrophe supplémentaire, contre toute attente et alors même que le cœur de la campagne du M5S avait été la dénonciation du Parti démocrate (socialistes), le M5S s’allie avec ce même Parti démocrate pour éviter de nouvelles élections. Autrement dit, tout a été fait pour éviter la victoire de la droite et le triomphe de Salvini. Giuseppe Conte est à nouveau nommé Président du Conseil.
Cette alliance a marqué la mort du populisme de gauche en Italie et du M5S. Ce dernier, gêné par les positions de Salvini sur la question migratoire et identitaire a préféré s’allier aux anciens partis de gouvernement qu’il n’a eu de cesse de dénoncer plutôt que de céder le pouvoir. A partir de ce moment, le M5S, a marche forcée, a entamé sa mue en parti de gouvernement de gauche, laissant un électorat populiste orphelin. Pour autant, cette alliance contre-nature n’a pu se maintenir. Le parti de Matteo Renzi, Italia Viva (sorte de En Marche bis), pièce essentielle de la faible majorité gouvernementale, n’a jamais pu s’accommoder d’une telle alliance et particulièrement de la personne de Giuseppe Conte, qui n’a cessé de grandir en influence au fil du temps. La crise du COVID sauva in
extremis le gouvernement de l’explosion en mars 2020, explosion qui fut reportée à février 2021. Pour des questions d’utilisation du fonds de soutien mis à disposition par l’UE, l’alliance explosa et Giuseppe Conte fut contraint à la démission.
Durant tout ce deuxième gouvernement Conte, Matteo Salvini, affaibli par sa défaite stratégique fut incapable de retrouver les ressorts de son succès de 2018. Il sombra même dans une soupe droitarde patriotique et assimilationniste, en axant sa communication sur sa proximité avec les bons « italiens » nouvellement « assimilés ». Malgré des nombreuses victoires aux élections régionales pour le Centre-droit (alliance des partis de droite), la Lega chuta lentement dans les intentions de vote pour atteindre 23% ; mais, fait notable, sans jamais quitter la première place des intentions de vote. La gauche et particulièrement le cartel Parti démocrate – M5S, ne sut pas non plus profiter de son expérience gouvernementale. Les deux partis se stabilisèrent autour de 19% et 17 % d’intentions de vote sans jamais aller au-delà. Il est désormais clair que la gauche ne sait plus convaincre les Italiens (preuve de la bonne santé politique des Italiens).
En revanche, pendant ce temps, une petite femme blonde aux grands yeux verts, commença à faire de plus en plus parler d’elle. Giorgia Meloni, présidente de Fratelli d’Italia (micro parti considéré comme néo-fasciste en 2018, ayant récolté seulement 4% de votes), propulsait son parti vers les étoiles. En profitant de la déception des électeurs souverainistes du M5S et de la Lega, Fratelli d’Italia a connu une croissance exponentielle.
Résultat, en février 2021, Fratelli d’Italia était le 3ème parti d’Italie avec près de 17% d’intentions de vote, devant le M5S1 !
Fratelli d’Italia incarne la droite identitaire et nationaliste italienne historique, contrairement à la Lega qui n’a que récemment lâché ses oripeaux régionalistes sous l’impulsion de Matteo Salvini pour rejoindre le nationalisme italien. Sur la base de cette légitimité et d’une ligne claire et sans concession (jusqu’à ce jour) basée sur : défense de l’Italie et de son identité (chrétienne particulièrement), sécurité, lutte contre l’immigration, recul de l’Etat, natalisme, Giorgia Meloni a su propulser son parti au sommet.
En février 2021, avec la nouvelle crise de gouvernement, alors qu’il apparaissait enfin possible que des élections soient convoquées, Matteo Salvini a fait le choix de soutenir le nouveau pseudo gouvernement d’union de Mario Draghi, ancien chef de la Banque centrale européenne, en échanges de quelques places de ministres pour la Lega, lui-même en étant écarté.
Ce choix pour le moins surprenant n’a pas manqué de continuer à décevoir ses électeurs à qui il répète depuis des mois que seules les élections peuvent amener du changement en Italie. Par ailleurs, Matteo Salvini s’est fendu de plusieurs déclarations d’amour à l’Union européenne, en parfaite contradiction avec ses idées passées, semblant à s’y méprendre à une forme de trahison pour un plat de lentilles.
Giorgia Meloni, qui a seule refusé de rentrer dans la coalition, a continué comme elle l’a toujours fait, à réclamer de nouvelles élections, reste donc confinée dans l’opposition. Pourtant, ce choix semble gagnant puisqu’à ce jour Fratelli d’Italia est toujours en pleine croissance, contrairement à la Lega, et atteint désormais le record de 20% d’intentions de
vote, faisant de son parti le deuxième d’Italie à un point de la Lega.
C’est donc aujourd’hui un duel de titans qui s’annonce pour la première place dans le cœur des Italiens entre deux partis à plus de 20% d’intentions de vote et qui seraient placés en France, non pas à droite, ni même à l’extrême droite de l’échiquier politique, mais bien au-delà.
Il existe donc encore un espoir à l’ouest. Les italiens n’ont pas perdu leurs réflexes identitaires ni leur conscience de peuple, et ils votent bien. En mettant ces deux partis en tête de leurs intentions de vote, il est clair que le signal est donné par les citoyens : nous ferons tout pour rester italien.
Maintenant, sauf rupture dans la majorité gouvernementale et élections anticipées, les prochaines élections générales auront lieu en 2023 et tous les signaux sont au vert pour voir enfin un pays d’Europe de l’ouest basculer dans les bras de la droite identitaire pour le mieux, nationaliste à tout le moins. Quelques concessions seront certainement à prévoir pour rassurer la droite molle, regroupée autour de l’inénarrable Silvio Berlusconi et consorts, et qui représente les 8% restant nécessaire pour atteindre les 50%+1 ; cela étant, sur les terres latines, le soleil de l’espoir semble être décidé à vouloir se lever !
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Merci à Florian, référent Braves de Suisse, pour cet excellent résumé.
Les sources utiles qui vont dans le sens de l’article :
Sondaggio SWG (15 febbraio 2021): intenzioni di voto (scenaripolitici.com)
PROGRAMMA_A4_REV2.pdf (fratelli-italia.it)
Ultimi sondaggi: Cresce il centrodestra, +0,5% per Fratelli d’Italia (la7.it)
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