Cet excellent texte provient du Journal de Renaud Camus, que vous pouvez lire en ligne quotidiennement sur le site de l’auteur : http://www.renaud-camus.net/journal
« Un maire me dit l’adorer (Éric Zemmour), suivre toutes ses émissions, l’avoir encore vu récemment lors de son débat avec Mélenchon et se préparer à voter pour lui, certainement, enfin sans doute, s’il est candidat ; mais non, à ce stade, ne pouvoir ni vouloir lui donner sa signature. Si encore il avait été possible de le faire anonymement, comme jadis, là, peut-être, je ne dis pas… Mais depuis quelques années c’est interdit. Alors il y aurait trop de gens qui protesteraient, ce serait trop d’embêtements…
Il me semble, hélas, que toute la France du XXIe siècle est là, tout notre destin inscrit dans cet échange décourageant avec cet honnête homme. Qu’est-ce qui a cassé un peuple à ce point, qu’est-ce qui en a fait cette mélasse ? Il veut bien être délivré, il ne lui déplairait pas qu’un sursaut se produise, il suit Zemmour avec intérêt ou même il l’adore (sic), il ne rate pas une seule de ses prises de parole ; mais quant à lever le petit doigt pour l’aider ou le soutenir, non, ce ne serait pas raisonnable, tout le monde ne serait pas d’accord, vous ne pouvez pas me demander cela.
Il y a maintenant un large consensus sur le constat. Mais prendre parti pour une solution, ah, non, là, plus personne… Il ne s’agit même pas de peur — peur de quoi ? Que je sache on n’est pas arrêté, ni torturé, ni fusillé. Il s’agit d’un simple souci du quant-à-soi. Bien sûr, vous avez raison, Zemmour a raison, la France se noie, il faudrait faire quelque chose, j’espère que certains vont le faire ; mais moi, non, impossible, que diraient les gens ?
Le mot lâcheté a été prononcé (« Je suis lâche, je sais ») — pas par moi, il va sans dire. »
NOTE : Magnifique. Renaud Camus a tout dit ici, en quelques mots. Il faut lire les grands écrivains pour comprendre le monde d’aujourd’hui.